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Analyses et propositions du Mouvement pour l’Economie Solidaire relatives au Pacte de croissance de l’ESS

Le Pacte de croissance de l’ESS doit être présenté au Conseil Supérieur de l’ESS lors de la plénière du 8 mars 2019. Le MES rejoint la majorité des membres d’ESS France pour critiquer sa méthode d’élaboration, puisque nous l’avons découvert le 29 novembre 2018, sans qu’aucun débat collectif avec les acteurs n’ait été organisé et alors même que le Conseil Supérieur de l’ESS n’a pas été réuni une seule fois en 2018.
Le 29 novembre 2018, Gabriel Attal présentait de son coté la feuille de route du gouvernement pour le développement de la Vie associative.

Le Mouvement pour l’Economie Solidaire et le Collectif des associations citoyennes ont choisi de publier fin novembre un communiqué commun, suite à ces deux présentations estimant que les propositions du gouvernement étaient très loin des attentes des acteurs de l’ESS et en particulier des associations.

Le Conseil d’administration du MES a depuis produit une note sur son analyse et ses propositions pour enrichir le Pacte de croissance de l’ESS, l’éclairage proposé ci-après s’appuie sur les échanges au sein du MES et de son CA, les échanges avec les partenaires, notamment le CAC et les analyses et échanges que nous avons eu au sein d’ESS France.

- 15 février 2019 - Analyses et propositions du Mes relatives au pacte de croissance de l’ESS

Le Mouvement pour l’Economie Solidaire a considéré les éléments du pacte ESS en lien avec le plan présenté sur la vie associative, une large partie de l’ESS comme de ses adhérents étant sous forme associative.

Afin d’alimenter la plénière du CSESS du 8 mars le Mouvement pour l’Économie Solidaire souhaite contribuer au débat en apportant son analyses et ses propositions pour enrichir le Pacte de croissance de l’ESS. L’éclairage proposé ci-après s’appuie sur les échanges au sein du Mes et de son CA, les échanges avec les partenaires, notamment le CAC et les analyses et les échanges que nous avons pu avoir au sein d’ESS France.

  • Quelques analyses sur le Pacte de croissance de l’ESS :

Sur le fond : le pacte nous apparaît peu politique. Il parle essentiellement des entreprises, minimisant le projet politique de transformation de l’économie et de la société porté par l’ESS. Rien ou prou n’est dit sur les grands défis contemporains auxquels l’ESS peut répondre. Il n’est pas mis en avant de prospective stratégique sur les solutions, dynamiques et enjeux que l’ESS contribue à élaborer et les stratégies de développement. Le plan présente plutôt un catalogue de mesures techniques, qui apparaissent trop souvent encore non financées par un budget public.
Sur la méthode, nous constatons
Un manque flagrant de concertation collective avec les acteurs de l’économie sociale et solidaire
Une vingtaine de mesures structurantes et des mesures complémentaires, ces dernières étant souvent les plus ambitieuses et les plus coûteuses sur le plan budgétaire.
Une inter ministérialité voulue dans les discours mais difficile, voire inexistante, dans les politiques ; ainsi le 29 novembre les plans sur la vie associative et sur l’économie sociale et solidaire (80 % des associations la composant) ont été présentés au même moment, sans nécessairement de cohérence entre les deux plans.
Bon nombre de mesures incluses dans le pacte, qualifiées de structurantes et qui vont dans le bon sens, se bornent à reprendre des mesures annoncées antérieurement ou en cours de discussion au Parlement dans le cadre de la loi PACTE ou du PLF 2019.

Sur les mesures, nos analyses :

Le rapport semble se concentrer sur l’entreprenariat social alors que ces entreprises ne représentent qu’une petite partie de l’ESS, un millier d’entreprises au mieux sur les 170 000 environ qui sont employeurs.
Aucun lien n’est fait avec les difficultés sociales et les inégalités contre lesquelles les initiatives d’économie solidaire entendent lutter : le pacte apparaît comme un ensemble de mesures « hors sol », sans aucun lien avec les besoins concrets des populations et des territoires. Il n’est fait aucune allusion aux valeurs collectives et citoyennes qui irriguent l’ESS.
Les territoires sont quasi absents du plan développé : aucun moyen pour des stratégies régionales (accord plan région, déclinaison des fonds structurels…), les pôles territoriaux de coopération économique ne sont pas cités ni les réseaux et autres formes de coopération territoriale, pas davantage les fonds territoriaux de développement associatif…
La transition écologique n’est pas évoquée alors que l’économie sociale et solidaire est rattachée au ministère de la transition écologique et solidaire.

La transformation du CITS en allégements de charges sociales patronales doit, selon le haut-commissaire, apporter 1,4 milliard aux entreprises de l’ESS. Toutefois, selon ESS France, les spécialistes estiment que ce serait plutôt 900 millions d’euros. De plus, il s’agit d’une mesure applicable à toutes les entreprises françaises, ce n’est donc que l’application pure et simple du principe d’égalité de traitement avec les entreprises privées. De plus, comme indiqué dans notre communiqué CAC-MES, cela pose question sur l’équilibre de notre système de sécurité sociale, fondé sur les cotisations sociales et précipite son affaiblissement. Or, nombre de structures de l’ESS contribuent, favorisent et s’adossent au système de protection sociale dans leurs actions. Les associations ont perdu 1,8 Md€ en deux ans du fait de la diminution des contrats aidés. Le bilan financier est, dans tous les cas, négatif pour l’ESS dans son ensemble depuis 2017.

Il n’y a aucune annonce sur l’emploi. Seule, l’ouverture du service civique à toutes les entreprises agréées ESUS est proposée, ce qui nous semble être une mesure dangereuse. Le service civique est un engagement citoyen de jeunes adultes qui ne remplace pas un emploi, il doit rester dans un cadre restreint et empreint d’intérêt général et de non lucrativité.

En ce qui concerne la fiscalité : le micro don n’est pas traité opérationnellement, le crédit impôt-recherche devra attendre la définition d’innovation sociale à travers le référentiel établi par la banque publique d’investissement, sans lien avec les réseaux d’acteurs ou des chercheurs. Il ne s’adresse pas en plus au champ non lucratif, une fois de plus discriminé. De même, la fiscalité relative aux finances solidaires est renvoyée à la nécessité de conduire un groupe de travail.

Le pacte propose de créer un groupe de travail sur les fonds européens, la création d’un dispositif bancaire d’avances de trésorerie et le développement de l’actionnariat solidaire. C’est bien, mais cela fait longtemps que ces sujets sont en discussion, quelle sera leur opérationnalité réelle et dans quels calendriers ?
Le LDDS – livret de développement durable et solidaire - est une bonne illustration. Il doit absolument, après toutes ces promesses non tenues à leur égard, être mis en œuvre début 2019.

Pour beaucoup d’acteurs de l’économie sociale et solidaire, les réformes fiscales sur l’impôt sur la fortune, l’augmentation de la CSG pour les retraités ou encore la mise en œuvre du prélèvement à la source, ont entraîné des remises en cause importantes des taux par les entreprises et par les personnes.
Pas un mot n’est consacré au financement public des acteurs associatifs, mutualistes, coopératives alors que le Mes comme ESS France et ses membres ont souligné à maintes reprises qu’il restait primordial de pérenniser les financements publics et les subventions aux associations.

Le pacte ne consacre pas une ligne au régime des garanties. Comme il sera fait appel à des investisseurs publics ou privés (INCO, Make Sense, RING, BNP Paribas, MIROVA…) pour doter les trois fonds d’amorçage prévus à hauteur de 80 M€ (cf IV, 2), ces investisseurs n’accepteront probablement pas d’investir dans ces fonds – très risqués puisqu’il s’agit d’amorçage- sans bénéficier d’une garantie publique.
Il est prévu de relancer les contrats à impact social avec une ambition affichée, ce qui est une mesure que nous jugeons dangereuse.

Il est mentionné une ambition également concernant les marchés publics mais qui semble se restreindre à une incitation sous forme d’observation sans contrainte.
Il est proposé de relever de 60 000 € à 72 500 € le plafond de chiffre d’affaires annuel en franchise des impôts commerciaux, ce qui est très modeste.

Il est exprimé une volonté de développer une culture française de la philanthropie. Si des formes de mécénat peuvent être intéressantes, notamment dans des formes de proximité, nous préférons l’impôt et la redistribution démocratique à la logique caritative, d’ailleurs souvent portée par des grandes entreprises capitalistes.
Le dispositif d’accompagnement – DLA - voit ses crédits diminués de 2 millions d’euros sur 2019 et une réforme est proposée avec le risque de concentration sur l’entreprenariat social et les projets qui visent le changement d’échelle, c’est-à-dire le changement de taille. Cela remettrait en cause les objectifs de ce dispositif qui vise d’abord la consolidation de l’emploi associatif mais aussi le respect de la diversité et les projets associatifs.

Rien n’est dit sur l’éducation initiale, sur la formation professionnelle autour de l’économie sociale et solidaire, ni sur les jeunes adultes en insertion.
Du côté des branches, ne sont évoqués ni les enjeux autour des opérateurs de compétences, ni les progrès à réaliser dans le champ de la démocratie sociale pour une meilleure prise en compte de l’ESS.

Beaucoup de mesures sont des mesures institutionnelles ou de promotion, parfois intéressantes, mais qui n’agiront pas directement sur le soutien au développement des entreprises d’économie sociale et solidaire.
On lit dans le pacte une forme d’ingérence de l’État dans l’organisation institutionnelle des acteurs de l’économie sociale et solidaire au vu de sa demande répétée de constituer une unique espace de représentation, faisant ici fi de la libre organisation et de la démocratie interne à ces réseaux de la société civile.
Il est aussi prévu une réforme du conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire alors qu’il a été très peu réuni sous l’actuel gouvernement et qu’il n’est pas remis en cause dans sa forme par la majorité des acteurs.
Il manque le développement d’un véritable service de l’ESS au niveau national, capable d’assurer une continuité.

Les référents pour l’État dans l’économie sociale et solidaire et la vie associative risquent de se concentrer au niveau des grandes régions, au détriment de référents plutôt identifiés jusqu’à maintenant un niveau départemental, système cohérent au regard de la proximité nécessaire pour la vie associative.

Le Haut-commissaire a rappelé le 29 novembre l’engagement de l’Etat de mobiliser 1 Md€ de financement public ou privé en faveur de l’ESS durant la législature en soulignant que 340 M€ avaient déjà été mobilisés. Selon ESS France, le seul engagement budgétaire nouveau de l’Etat prévu dans le pacte consiste à doter d’1 M€ un Fonds de promotion de l’évaluation de l’impact social et environnemental. Sont ici comptabilisés les crédits mobilisés par l’Etat, les 90 M€ de crédits de fonctionnement du Haut-Commissariat d’ici 2022. Pour tout le reste, il sera fait appel à d’autres financements publics ou privés pour lesquels aucun engagement ferme n’a été indiqué, sauf de la part de la Banque des territoires :

Pour le FISO 2 (21 M€), calibré pour financer 200 projets, il n’est pas précisé comment il sera financé, étant rappelé que le FISO 1 a été doté par le PIA et les régions ;
Pour les trois fonds d’amorçage (80 M€), on compte sur des investisseurs à impact, publics ou privés ;
La Banque des territoires a annoncé le 29 novembre 2018 des financements à hauteur de 150 M€.

  1. Plan sur la vie associative

Sur les mesures de financement

Il est annoncé un accroissement en 2018 et 2019 des crédits consacrés au service civique (+ 63 M€ en 2018 et + 49 M€ en 2019), ce qui peut aller dans le sens d’un plus grand engagement des jeunes adultes, s’il n’est évidemment pas question de substitution avec les emplois aidés, telle que parfois cela peut être perçu dans les informations délivrées par l’Etat.

Soutien aux associations employeuses par :
La réduction des cotisations patronales a été analysée plus haut dans le pacte pour l’ESS ;
Le maintien du crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires en 2018 et en 2019, soit une économie annuelle annoncée de 500 millions d’euros pour les structures de plus de dix salariés. Nous nous posons la question du maintien de l’abattement sur la taxe sur les salaires pour les plus petites associations.
Soutien aux petites associations, via le maintien de l’affectation de 25 millions d’euros au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA). Cela va dans le bon sens, mais le montant reste bien trop faible au regard des besoins et des baisses budgétaires qu’ont subies les associations ces dernières années.

Concernant les mesures sur la structuration : bien qu’allant globalement dans le bon sens, elles demeurent insuffisantes pour accompagner les associations dans leurs difficultés.
L’Etat annonce qu’il accompagnera les associations pour mutualiser plus facilement les fonctions supports, les locaux, les salariés, etc., notamment en incitant à la construction de groupements d’employeurs : des appels à projets territoriaux seront lancés et les lauréats bénéficieront, au total, d’un poste Fonjep par groupement et de 3 millions, non renouvelables, comme dotation au fonds associatif pour enclencher la cette dynamique commune.

Pour simplifier la vie des associations, le dispositif « Impact Emploi », qui permettait aux associations de moins de 10 salariés de déporter leurs formalités administratives sur l’URSSAF, devrait être élargi aux associations de moins de 20 salariés.
Un soutien doit également être apporté aux associations dont le modèle fait l’objet de mutations, notamment par des fonds de formations complémentaires destinés à la gestion des structures (via le FDVA).

Le Mouvement pour l’Economie Solidaire plaide pour des mesures plus structurantes sur le soutien à l’emploi dans les associations d’utilité sociale et les formes de coopération. Il est à noter qu’il est dommageable que le DLA perde des moyens alors qu’il est un dispositif important d’accompagnement des associations.
Bénévolat
Une meilleure reconnaissance de l’engagement bénévole tout au long de la vie est en effet essentielle.

Fiscalité / philanthropie
Le plan sur la vie associative veut faciliter les dons des TPE et PME (la limite des versements éligibles s’élevant désormais à 10 000 €) afin d’inciter les dons à l’échelle locale, pour le développement de projets dans leur environnement immédiat.
Il veut favoriser le mécénat financier et de compétences. Dès 2019, des mesures doivent être prises pour que l’engagement des entreprises envers les associations soit reconnu par un label, dans leurs certifications, notamment de qualité, dans leur responsabilité sociale. Développement du mécénat de compétences dans les administrations publiques.
Nous sommes, comme indiqué auparavant, globalement très critiques sur la promotion d’une nouvelle culture de la philanthropie pour développer la dynamique associative et citoyenne.

  1. 10 PROPOSITIONS DU MOUVEMENT POUR L’ECONOMIE SOLIDAIRE

Comme indiqué dans notre communiqué commun MES/CAC, il est aujourd’hui essentiel que le plan pour l’ESS affirme :

Un discours politique sur l’ESS en lien avec la transformation sociétale et une citoyenneté économique, pleine et entière des personnes, centrée sur l’exigence de respect des droits fondamentaux, de la justice sociale, de la transformation écologique, de la solidarité démocratique...Nous attendons une expression et une orientation politique forte sur le pouvoir d’agir de l’ESS et la reconnaissance et la prise en compte de la diversité et la multitude des initiatives de l’ESS sur l’ensemble du territoire national et au-delà.

Et au delà de la contribution d’ESS France que nous partageons pleinement, nous formulons 10 propositions pour enrichir le Pacte :

1. Appuyer les mesures en soutien aux PTCE et à la diversité des formes de coopération

Le Mouvement pour l’Economie Solidaire a largement travaillé au sein de l’inter-réseaux sur les PTCE et a réalisé le dernier séminaire en date sur les PTCE et la citoyenneté économique en 2017 à l’Ile Saint Denis, accueillant Odile Kirchner et des expressions de l’Etat, des membres de l’inter-réseaux comme des PTCE sur le plan de soutien au PTCE.

Nous souhaitons donc être associés au CNCRESS et au Labo de l’ESS qui suggèrent de consolider les caractéristiques des PTCE et leur mode d’évaluation, de développer des moyens de financement et d’organiser une dynamique transversale entre PTCE.

Nous souhaitons ajouter au-delà que « Pour le Mouvement pour l’Economie Solidaire, il est essentiel que les dynamiques de coopération territoriale dans leurs diverses formes (PTCE, CAE, SCIC, GE, collectifs sectoriels ou transversaux, tiers-lieux etc.) qui entretiennent des pratiques coopératives (gouvernance, économique…) et engagent des actions innovantes (innovation sociale, citoyenneté, exercice des droits …) puissent être mieux observées et comprises et soient largement prises en compte, avec leurs spécificités et leurs fragilités, dans les mesures d’appui à l’ingénierie et d’appui financier. »


2. Emplois associatifs et ESS, emplois d’utilité sociale

Nous proposons de créer des emplois d’utilité sociale en fonction des besoins repérés par les structures ESS sur les territoires et dédiés au fonctionnement de celles-ci et non relatives au statut des personnes candidates : négociation au cas par cas d’emplois d’utilité sociale avec les structures ESS dont les structures associatives (par exemple, sur le modèle des emplois jeunes). Cette proposition vise principalement à soutenir les associations, qui ont vu les emplois aidés disparaître et les subventions diminuer fortement et se retrouvent malgré leur forte utilité sociale extrêmement contraintes.

3. Nouvelles formes d’emploi et d’activités : appui, droit à l’expérimentation et recherche

La raréfaction de l’emploi est un fait sur beaucoup de territoires, la place de plus en plus prépondérante du numérique indique que de multiples métiers sont appelés à se transformer voire à disparaître tandis que d’autres se créeraient. Rien ne dit que les nouveaux métiers qui en seraient la conséquence compenseront ceux qui auront disparu. On constate aussi un marché de l’emploi de plus en plus précarisé cependant qu’augmente le nombre de micro-entreprises individuelles qui assurent beaucoup moins bien la protection des personnes. La perte de sens au travail et l’ampleur des phénomènes de burn-out génèrent une prise de conscience de nombres de personnes, qui souhaitent « réinvestir » l’humain, l’utilité sociale, la transition écologique, l’implication pour des activités ou un emploi qui ont du sens, en retrouvant du pouvoir d’agir et devenant acteurs d’une démocratie.

C’est un défi pour notre société d’intégrer de nouvelles approches du travail et d’activité relevant de l’utilité sociale en associant le monde de la recherche. Cela suppose d’expérimenter en nous appuyant autant sur la question des droits sociaux (protection sociale, retraite, santé, formation, assurances), que sur celle des droits humains fondamentaux. Cette démarche doit être corrélée à un travail plus avancé sur les indicateurs de richesse qui ne sauraient être qu’uniquement basés sur des critères économiques (nombre d’emplois, part de PIB…) mais plus sur des notions de bien-être, de qualité de vie, de responsabilité et de prévention, de gestion anticipée des risques (coûts évités pour les générations futures).

Ces deux propositions partent du constat suivant :

Le travail ne manque pas et relève des besoins sociaux et sociétaux non satisfaits qui ont pour conséquence une aggravation des phénomènes d’inégalités, d’exclusion et de discrimination. De multiples activités ne sont pas solvables sur le marché et, lorsque celui s’empare de ces activités, il ne les remplit que pour la part la plus rentable et en les transformant. Or, des emplois durables peuvent être créés localement par les acteurs de territoires. En effet, les compétences, les savoir-faire ne manquent pas et existent chez les habitant.e.s. Nous constatons que les finances publiques ne manquent pas non plus et servent soit à financer fortement de grandes entreprises qui parfois se désengagent des territoires (exemple Ford) soit à régler les dégâts écologiques et sociaux d’entreprises polluantes et non responsables. Il est temps de flécher ces financements (hors politiques d’investissement ESS tout à fait nécessaires) sur des projets de territoire innovants portés par des acteurs locaux.


Nouvelles formes d’emplois/d’activités

Favoriser les expérimentations dans une perspective de territoires inclusifs et solidaires alliant activités et emplois d’utilité sociale et permettant d’exercer une citoyenneté économique au sens large (revenus de base…).

Emplois et activités des personnes éloignées de l’emploi

Soutenir le développement d’emplois en favorisant les expérimentations originales territoriales construites localement : groupement d’employeurs, GEIQ favorisant des emplois locaux et durables. Exemple : emplois saisonniers/ agricoles/ touristiques… en milieu rural. L’expérience des Territoires Zéro Chômeurs de Longue Durée (entreprises à but d’emploi) en ce sens est intéressante comme les foisonnantes expériences menées par les acteurs de l’insertion par l’activité économique.


4. Une ingénierie financière adaptée aux TPE avec effets leviers et l’appui aux réseaux d’accompagnement de proximité

Le Mouvement pour l’Economie Solidaire s’associe aux autres membres d’ESS France pour souligner l’importance de soutenir les réseaux d’accompagnement. Il nous semble fondamental de préciser la nécessité de soutenir non seulement les réseaux nationaux et les grands mouvements comme la diversité des réseaux territoriaux auto-organisés et de proximité. Un des points sur lesquels insiste notre réseau est l’appui à des formes de coopérations inter-associatives, inter-entreprises (Pôles de coopération, PTCE, réseaux de coopération micro- territoriaux, régionaux, collectifs associatifs, les filières, groupement d’employeurs, SCIC, collectifs associatifs).

Le Mouvement pour l’Economie Solidaire exprime son inquiétude relative au dispositif DLA dont il a constaté la baisse de moyens, alors qu’il constitue un dispositif décisif pour les initiatives d’économie solidaire. Au vu de la réforme pour 2020 et des baisses budgétaires en 2019, il souhaite alerter sur les risques de concentration au détriment de la diversité des structures accompagnées et demande un renforcement de ses moyens pour répondre aux enjeux de coopération et des recompositions territoriales et sectorielles à l’œuvre, qui peuvent nécessiter des ingénieries plus longues. Il est nécessaire de soutenir l’écosystème des dispositifs d’accompagnement à la création d’activités d’ESS bien au-delà de ce qui est proposé aujourd’hui via le French impact.

Ainsi, une proposition est de développer un dispositif d’amorçage permettant l’accès à une subvention pour les nouveaux entrepreneurs ESS (moins de deux ans d’existence) afin de ne pas engager sur les deux premières années une logique d’endettement mais plus un soutien à l’émergence permettant la consolidation du modèle économique. Soutenir l’écosystème des dispositifs d’accompagnement à la création d’activités d’ESS doit aller au-delà de ce qui est proposé aujourd’hui via le French impact dédié principalement à l’innovation sociale et aux start-up de l’ESS.


5. Subventions

Réaffirmer la subvention et l’usage de la convention pluriannuelle d’objectifs pour sécuriser les petites et moyennes structures telle que le stipule l’article 59 modifie la loi de 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations et la circulaire N°5811 du Premier ministre Manuel Valls fait suite à la charte des engagements réciproques entre l’État et associations datée de février 2014 et l’ordonnance portant simplification du régime des associations et des fondations.


6. Accès aux fonds européens déclinés sur les territoires pour les TPE de l’ESS

Le Mouvement pour l’Economie solidaire souhaite que l’Etat insiste sur la prise en compte des TPE de l’ESS dans les orientations de la politique de cohésion sociale (FSE) et territoriale ainsi que dans la politique agricole commune au niveau européen. Les modèles alternatifs d’agriculture doivent être mieux pris en compte comme les modèles d’un entreprendre autrement qui aident au développement durable local (Feader, Leader…). En plus de l’appui d’un organisme intermédiaire et de dispositifs de trésorerie, les TPE de l’ESS doivent pouvoir être accompagnées et soutenues dans l’ingénierie de coopération que nécessitent très souvent ces démarches et elles doivent pouvoir enclencher des dynamiques de coopération propres sans pour autant dépendre d’organismes plus gros. Il est aussi demandé des simplifications administratives et une meilleure adéquation des formes et indicateurs d’évaluation.

7. Commande publique responsable

La commande publique responsable est un levier essentiel pour le développement de l’ESS. L’ESS doit faire entendre sa voix pour faciliter l’accès des entreprises de l’ESS aux marchés publics. Le nouveau Code des Marchés publics entre en vigueur le 1 er avril 2019 (l’ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 et du décret n° 2018-1075 du 3 décembre 2018) et ouvre de nouvelles perspectives. Nous proposons que l’Observatoire économique de la commande publique (OECP) intègre actuellement une représentation du secteur de l’Economie sociale et solidaire.

Un enjeu majeur est d’utiliser la commande publique responsable comme outil de soutien aux activités d’utilité sociale des petites et moyennes structures de l’ESS. C’est reconnaître leur rôle dans la société pour lutter contre la désertification en milieu rural, valoriser l’implication de la société civile, et soutenir ces organisations notamment dans les quartiers défavorisés ou populaires. Par conséquent, il est nécessaire de former les acteurs publics, et notamment l’Etat à une pratique adaptée (formation à la connaissance de la diversité des services de l’ESS, montage de marchés publics plus intégrateurs en optant régulièrement pour une pratique d’allotissements adaptés aux petites et moyennes structures de l’ESS ou à leurs regroupements et par l’obligation de critères plus qualitatifs, « mieux disant ». La construction des marchés publics d’envergure doit pouvoir intégrer pour partie et de manière plus conséquente une attention vers ces entreprises de l’ESS, qui restent écartées de ces opportunités.

Enfin, l’Etat devrait jouer un rôle pour appuyer la création de postes territoriaux de référents « Commande publique responsable et clauses sociales », facilitateurs de coopération, en capacité de faire interface entre les Collectivités locales, l’Etat, les entreprises de l’ESS et les entreprises locales hors de l’ESS. De multiples études ont montré que ce type de poste amplifie et développe la commande publique responsable.

8. La co-construction des politiques publiques au national et territorial :

La loi de 2014 a institué les conférences régionales de l’ESS mais leur mise en œuvre ne s’articule pas réellement à la mise en place de plans entre l’Etat et les collectivités locales pour une stratégie de développement partagée (Plan Etat Région, Loi NOTRe).

9. Un guide de l’ESS comme outil crucial pour la valorisation des pratiques de l’ESS

Le Mouvement pour l’Economie Solidaire demande des moyens pour mettre en œuvre réellement le guide d’amélioration continue des bonnes pratiques dans les entreprises de l’ESS, qui constitue pour nous un instrument d’éducation populaire, un référentiel partagé dans l’ESS et un outil d’accompagnement à la progression des pratiques réelles. Il s’agit d’intégrer dans le plan pour l’ESS l’article 3 de la loi 2014 pour une démarche généralisée de démarches d’amélioration continue des pratiques de l’ESS. L’obligation faite par la loi de progresser dans les pratiques par la mise en place de ce guide dans les entreprises de l’ESS doit être soutenue par des mesures d’accompagnement et de moyens.

10. Mieux prendre en compte l’accompagnement de l’insertion des jeunes adultes dans l’ESS

Le Mouvement pour l’Economie Solidaire relève la faiblesse de la prise en compte des jeunes adultes tant dans leur formation supérieure que dans leur insertion professionnelle. Il est nécessaire de renforcer les liens avec les organismes concernés (universités, missions locales…), des projets globaux et territoriaux doivent pouvoir être développés sous l’impulsion de l’ESS (à l’exemple du PIA AJIR dans le département de l’Ardèche). De la même manière, les perspectives de mobilité à travers le programme Erasmus doivent être soutenues pour permettre aux jeunes adultes, porteurs de projet ou futurs et jeunes professionnels, de s’ouvrir à l’ESS en Europe, en particulier pour les jeunes en territoires ruraux et dans les quartiers populaires.

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MES-15022019-Analyses et Propositions pacte de croissance de l’ESS