L’année 2017 sera sans aucun doute une année charnière en raison de l’actualité politique, à la fois internationale et nationale avec les élections présidentielle et législatives.
Pour l’économie solidaire, cette année est d’autant plus importante que la question d’un changement de paradigme économique est un pivot central autour duquel s’organisent en grande partie les programmes des candidats à la présidence tout du moins dans leurs déclaration, tout comme sans doute par la suite ceux des candidats aux législatives.
Deux orientations majeures sont en opposition :
- Sur le modèle économique : la poursuite d’un modèle productiviste et la course sans fin à la croissance versus la recherche d’un modèle de sobriété énergétique et moins consumériste.
- Sur le rôle de l’État et notamment le sort réservé aux services public : le système d’assistance aux personnes en difficultés avec une option de privatisation de tout ce qui peut l’être versus une volonté de maintien voire d’amélioration d’une solidarité basée sur la redistribution.
Le Mouvement pour l’Économie Solidaire, se situe clairement du côté d’un rééquilibrage dans la répartition des richesses qui font l’objet d’une hyper concentration entre une minorité de possédants pendant que ceux qui assurent de fait la production des richesses sont réduits aux salaires ridiculement faibles voire aux minima sociaux.
La question du revenu d’existence fait débat et on ne s’étonnera pas qu’elle devienne le point de rupture entre ceux qui considèrent la valeur travail comme fondatrice de la cohésion sociale quand d’autres (et pas forcément les chômeurs) souhaitent lui redonner un rang moins fondamental, considérant que d’autres espaces d’activité humaine devraient être également privilégiés (les relations parents-enfants, la créativité hors travail, les réseaux d’amitié, les activités culturelles etc). Le revenu universel d’existence est une façon de rétribuer des fonctions essentielles tout en permettant aux personnes de vivre dignement. On n’entamera pas d’argumentation ici sur ces questions, mais on rappellera que toutes les initiatives de l’ESS posent la question de la place du travail dans la vie humaine : quel contrôle sur l’entreprise pour les coopératives, quel équilibre entre salariés et bénévoles dans les associations, quel sens donner à l’acte de produire et de consommer, quelle répartition de la richesse (delta entre hauts et bas salaires), comment être son propre employeur sans pour autant risquer la précarité faute de couverture sociale (les CAE), comment faire reconnaître le travail culturel dans toutes ses dimensions etc.
La question de la transition écologique est également une des dimensions clivantes. Peu de candidat-e, à quelques exceptions près, conteste - du moins publiquement - le réchauffement climatique. En revanche, l’urgence de réduire les impacts de l’activité humaine est peu soulignée, voire ignorée par la majorité des candidats comme on a pu le constater si on a suivi les débats tant de droite que de gauche.
Pour ceux qui s’efforcent depuis des années de faire progresser la prise de conscience d’un nécessaire changement d’imaginaire démocratique, économique et social et qui soutiennent ou créent des initiatives dans ce sens, ces élections sont un test. En effet on constate depuis plusieurs années une décrue des financements alloués à l’ESS sur les territoires, (voir en particulier la disparition emblématique de l’Atelier centre de ressource de l’ESS en région Île de France et les situations dramatiques de nombreuses associations). Or l’ESS qui remplit dans de multiples cas une fonction d’animation et de régénération des territoires, de création d’activités d’utilité sociale, d’innovation sociale et technologique devrait à plusieurs titres émarger aux fonds publics dédiés à ces dimensions.
Mais l’économie solidaire dérange quand elle met en lumière les capacités d’organisation des citoyens adossées à une remise en cause du système productiviste et financiarisé. Pourtant la multiplicité des formes que cet engagement citoyen adopte, s’il présente l’inconvénient d’une certaine atomisation des forces et des énergies, démontre qu’un monde nouveau s’invente concrètement.
Le Mouvement pour l’Économie Solidaire sera très attentif aux discours des candidats et plus encore aux actes qui suivront. De même il s’associera aux mouvements citoyens qui questionneront les différents partis et continuera à affirmer que l’ESS, laboratoire d’une nouvelle société, représente une des alternatives possibles à un modèle désormais obsolète et dangereux pour l’avenir de l’humanité.
Le conseil d’administration du MES